Juillet 2016 - MEDITATION et Liberté Bouddhisme et Spiritualité

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Juillet 2016

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Invitation à prendre conscience
Invitation pour chacun de nous, à prendre conscience des multiples conditionnements qui nous environnent - Idéologies, Croyances, Modèles sociaux... - afin de nous en dégager et de trouver en nous-même la source de notre liberté. (d'après un enseignement de J. Krishnamurti en 1968)


La solution n'est pas du côté du temps
Toutes les religions affirment depuis toujours que le temps est nécessaire - le temps psychologique dont nous parlons ici. Le paradis est loin, très loin, et l'on ne peut y accéder que par un processus graduel d'évolution, qui passe par la répression, ou par l'accomplissement, ou par l'identification à un objet, à une entité d'ordre supérieur. Or nous voulons savoir s'il est ou non possibe de se libérer de la peur de façon immédiate. Dans le cas contraire, la peur engendre le désordre, le temps psychologique suscite inévitablement en nous le désordre.
Je conteste toute cette notion d'évolution - non pas celle de l'être physique, mais celle de la pensée, qui s'est identifiée à une forme particulière d'existence liée au temps. Le cerveau, de toute évidence, a évolué pour parvenir à son stade actuel, et il est toujours susceptible d'évoluer, de se développer encore. Mais en tant qu'être humain, je vis depuis "x" années au sein d'un univers tissé de théories, de conflits et de concepts en tous genres, et au sein d'une société dans laquelle la rapacité, l'envie et la compétition ont engendré tant de guerres. Je fais partie intégrante de tout cela. Pour celui qui souffre, chercher la solution du côté du temps, compter sur la lente évolution de notre espèce dans les deux millions d'années à venir, voilà qui n'a aucun sens.
Pouvons-nous, tout en étant constitués comme nous le sommes, nous libérer de la peur et du temps psychologique ? Le temps physique doit exister : nul ne peut y échapper. Mais la question est de savoir si le temps psychologique est en mesure d'apporter l'ordre non seulement à l'individu, mais à la société. Nous faisons partie de la société, nous n'en sommes pas isolés. Que l'ordre règne au-dedans, au sein d'un être humain, et il régnera forcément au-dehors, dans la société.
Les croyances empêchent la vraie compréhension
Si nous n'avions pas de croyances, que nous arriverait-il ? Ne serions-nous pas très effrayés de ce qui pourrait se produire ? Si nous n'avions pas une ligne de conduite fondée sur une croyance - Dieu, le communisme, le socialisme, l'impérialisme, ou quelque autre formule religieuse, quelque dogme qui nous conditionne -, nous nous sentirions complètement perdus, n'est-ce-pas ? Et l'acceptation d'une croyance n'est-elle pas une façon de masquer notre peur, cette peur de n'être rien du tout, d'être vide ?
Mais après tout, un récipient n'est utilisable que lorsqu'il est vide, et un esprit qui est empli de croyances, de dogmes, d'affirmations, de citations, est en vérité un esprit stérile, une machine à répétition. Echapper à cette peur - à cette peur du vide, de la solitude, à cette peur de n'arriver nulle part, de n'être rien, de ne rien devenir -, voilà certainement une des raisons qui nous font accepter les croyances avec tant d'avidité et d'enthousiasme, ne croyez-vous pas ?
Et par l'acceptation de quelque croyance, pouvons-nous nous connaître ? Au contraire, une croyance religieuse ou politique, nous interdit de nous connaître, de toute évidence. Elle agit comme un écran à travers lequel nous regardons. Mais nous est-il possible de nous voir nous-mêmes, si nous n'avons pas de croyances ? Je veux dire que, si nous écartons toutes ces croyances, les nombreuses croyances que nous avons, reste-t-il encore quelque chose en nous à regarder ? Si nous n'avons pas de croyances auxquelles notre pensée nous a identifiés, l'esprit n'étant identifié à rien est capable de se voir tel qu'il est - et c'est assurément là que commence la connaissance de soi.
Le mal peut-il être justifié ?
De toute évidence, la crise qui affecte le monde entier à l'heure actuelle est exceptionnelle et sans précédent. L'histoire a connu, à différentes époques, des crises diverses - d'ordre social, national, politique. Les crises vont et viennent : les récessions économiques, les dépressions surviennent, subissent des mutations et continuent sous une forme différente. Cela, nous le savons et ce processus nous est familier. Mais assurément , la crise actuelle est différente, ne croyez-vous pas ? Différente tout d'abord parce que nous ne touchons pas là à des questions financières ou matérielles, mais à un problème d'idées. La crise est exceptionnelle parce qu'elle se situe dans le domaine du mouvement des idées.
Nous nous battons à coups d'idées, nous justifions le meurtre ; partout dans le monde nous justifions le meurtre en tant que moyen de réaliser une juste cause, ce qui est en soi-même sans précédent. Auparavant, le mal, le meurtre, étaient reconnus pour ce qu'ils étaient, mais aujourd'hui le meurtre est un moyen de réaliser de nobles objectifs.
On justifie le meurtre, qu'il s'applique à un individu ou à un groupe, parce que le meurtrier le présente, le justifie comme étant le moyen de réaliser une fin qui sera bénéfique à l'humanité. Autrement dit, nous sacrifions le présent sur l'autel de l'avenir - et peu importent les moyens, dès l'instant où notre but déclaré est d'obtenir un résultat prétendument bénéfique pour l'humanité. Cela implique par conséquent qu'une juste fin puisse être atteinte par des moyens pervers, que l'on justifie grâce à un système d'idées...
Nous élaborons de splendides édifices idéologiques afin de justfier le mal, et c'est une situation sans précédent. Le mal, c'est le mal, et il ne peut apporter rien de bon. La guerre n'est pas la voie vers la paix.
L'évolution de l'homme
Faut-il connaître l'ivresse pour connaître la sobriété ? Faut-il passer par la haine pour savoir ce qu'est la compassion ? Faut-il subir des guerres, se détruire et détruire autrui, pour savoir ce qu'est la paix ? Ce mode de raisonnement est à l'évidence totalement faux. Vous partez du principe qu'il y a une évolution, un développement, un mouvement du mal vers le bien, et ensuite vous figez votre pensée dans ce schéma. Bien sûr, le développement physique existe - la petite plante devenant un grand arbre - et aussi le progrès technique, qui voit au fil des siècles l'évolution de la roue jusqu'à l'avion à réaction.
Mais existe-t-il un progrès, une évolution sur le plan psychologique ? C'est cela, l'objet de notre discussion - savoir s'il y a une progression, une évolution du "moi", commençant par le mal pour finir par le bien. Le "moi", qui est le centre du mal, peut-il jamais devenir noble et bon, grâce à un processus d'évolution, grâce au temps ? Non, c'est évident. Ce qui est mauvais, le "moi" psychologique, restera toujours mauvais. Mais nous refusons d'admettre ce fait. Nous croyons que, grâce à un processus temporel de progrès et de changement, le "je" finira par devenir parfait, avec le temps. Tel est notre espoir, tel est notre plus cher désir - qu'avec le temps, le "je" atteigne la perfection.
Mais qu'est-ce que ce "je", ce "moi" ? C'est un nom, une forme, un paquet de souvenirs, d'espoirs, de frustations, de désirs, de souffrances, de joies éphémères. Nous voulons que ce "moi" se perpétue jusqu'à devenir parfait, et nous disons donc qu'au-delà du "moi" existe un "super-moi", un être supérieur, une entité spirituelle qui est éternelle - mais puisque c'est notre pensée qui a conçu cette entité, elle demeure dans le champ du temps, n'est-ce pas ? Si notre pensée peut concevoir cette entité, c'est évidemment qu'elle est enclose dans les limites de notre champ de raisonnement.
La connaissance de soi
Toute relation est un miroir. La connaissance de soi ne dépend pas d'une quelconque formule. Peut-être cherchez-vous à vous connaître grâce à l'aide d'un psychologue ou d'un psychanalyste ; mais cela n'a rien à voir avec la connaissance de soi. Celle-ci survient lorsque nous prenons conscience de nous-même dans la relation, révélatrice de ce que nous sommes, seconde après seconde. Toute relation est un miroir dans lequel nous nous voyons tels que nous sommes vraiment.
Or nous sommes pour la plupart incapables de nous regarder en face tels que la relation nous révèle, parce que nous nous mettons immédiatement à condamner ou à justifier ce que nous constatons. Nous jugeons, nous évaluons, nous comparons, nous nions ou nous admettons, mais jamais nous n'observons vraiment "ce qui est" : appararemment, c'est ce qu'il y a de plus difficile pour la plupart des gens ; et pourtant c'est par là, et par là seulement, que passe le commencement de la connaissance de soi.
Si l'on peut se voir tel qu'on est dans le miroir que nous tend toute relation, et qui nous renvoie une image fidèle, si l'on peut simplement plonger dans ce miroir un regard totalement attentif, et voir réellement "ce qui est", en être conscient, mais sans condamnation, jugement ni évaluation - en agissant comme lorsqu'on est animé par un intérêt passionné -, alors on s'apercevra que l'esprit est capable de se libérer de tout conditionnement ; ce n'est qu'alors qu'il est libre de découvrir ce qui est au-delà du champ de la pensée.
En définitive, l'esprit, si érudit ou mesquin qu'il soit, est limité, conditionné, tant au niveau conscient qu'inconscient, et toute extension de ce conditionnement reste toujours à l'intérieur des limites du champ de la pensée. La liberté, c'est donc tout autre chose.
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